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Face au décès de proches en voyageFaire face au décès de proches en voyage, c’est un article très personnel que j’écris là, sans doute le plus personnel depuis le début du blog. Cet article est un peu un passage obligé, une mise à nu. J’ai besoin de coucher sur le papier ce que mon cœur me dit, écrire ce que je ressens face à certains évènements.

C’est sans doute à vif que je l’écris. Vous êtes mes lecteurs, vous me suivez dans mes aventures, ici j’ai envie de partager avec vous cette partie personnelle qui fait mal, qui déchire. J’espère également que cet article fera prendre conscience d’une réalité du voyage. Puis, je dois l’avouer, j’écris d’abord cet article pour moi. J’espère secrètement qu’il m’aidera à passer cette étape de la vie.

Je suis dans le terminal 2 de l’aéroport d’Heathrow de Londres au moment où j’écris ces lignes, en partance pour Montréal où je suis en PVT. Je quitte, de nouveau, ma famille pour 6 mois. Je regarde les gens déambuler dans cet aéroport. Toutes les 2-3 minutes, je jette mon regard vers les grandes baies vitrées où des avions atterrissent. Certaines fois, cinq se suivent sur la piste d’atterrissage avec à peine une minute d’intervalle, c’est un beau spectacle que ce ballet aérien.

Mais soit. Si j’écris cet article, c’est parce que je souhaite parler d’une chose à laquelle on songe parfois lors d’un départ en voyage mais sans vraiment y penser. On se dit que ça ne nous arrivera pas… et pourtant !

 

Face au décès de proches en voyage

Ce que je veux aborder, c’est le décès. Pas de son propre décès, sinon vous ne pourriez pas lire ceci bien sûr… mais du décès de proches en voyage.

Quand tu pars en voyage pour une longue période. Tu te sens un peu invincible. Tu t’apprêtes à partir à l’aventure que tu as tant désirée. Un an de voyage, c’est beau, c’est grand, c’est génial. Mais c’est aussi être un an loin de tous ceux que l’on connait.

Face au décès de proches en voyage

 

La première fois

Brièvement, tout a commencé en mars 2005. J’étais parti avec l’école pour un voyage de deux jours à Paris. Deux simples jours que j’ai par la suite longtemps regretté. Mon grand-père était à l’époque hospitalisé pour une opération suite à un cancer au poumon. La situation n’était pas fantastique. Il en est décédé après être entré dans le coma. Les deux derniers jours où il était conscient furent les deux jours où je me trouvais à Paris. Mon absence a longtemps été source de regrets à mes yeux.

Face au décès de proches en voyage

 

La seconde fois

Un jour de 2016, le 17 février. J’étais assis dans la cuisine, je bossais pour le blog, j’étais tout content. Heureux d’être à Montréal, d’avoir cette vie là. Et d’un coup, tout a basculé, j’étais comme perdu après avoir reçu un SMS de ma maman. « Mamy est décédée ». Court, bref, percutant. 1000 choses se bousculaient dans ma tête, je ne savais pas quoi faire. Rentrer ? Rester ? Voir avec l’assurance voyage ce qui pouvait être fait ?

On était alors en février et j’étais censé rentrer en Belgique six semaines plus tard pour participer au salon des blogueurs voyageurs à Bruxelles. Mon vol était réservé depuis début janvier. Retrouver ma famille dans des circonstances pareilles, après avoir vécu de si belles expériences, m’effrayait un peu.

Les jours passaient, je devais prendre une décision. Payer de ma poche mon billet d’avion aller-retour si proche d’un autre départ était difficilement envisageable. Je n’avais pas encore de travail, j’avais postulé à plusieurs emplois et je risquais peut-être de manquer une opportunité. Mon compte bancaire canadien se vidait, je devais faire attention avec le loyer qui arrivait.

En fin de compte, je me suis rendu à l’évidence que rentrer serait difficile. Je ne serais alors pas présent à l’enterrement, c’était décidé. Décidé mais pourtant j’hésitais encore. Je me sentais mal. Mal d’être absent à l’enterrement de ma grand-mère de 94 ans. Nous avions fêté en famille ses précédents anniversaires au restaurant. Je n’étais pas là au dernier qui avait eu lieu quelques jours avant son décès. Je savais que son état empirait, ma maman me le racontait lors des Skype. Je voulais aller la voir lors de mon retour début avril, avec l’appréhension que ce serait sans doute la dernière fois. Je n’en ai pas eu l’occasion.

Oui ça m’a fait mal de ne pas pouvoir être là mais je pensais que ça se terminerait là. Juste là. Que cette souffrance ne grandirait pas. Si seulement…

Face au décès de proches en voyage

 

 

La troisième fois

Le 30 mars 2016, j’étais heureux. Je repartais en Belgique après 6 mois de PVT au Canada. J’allais enfin retrouver tout le monde. Avec mon autre grand-mère, on se parlait tous les dimanches sur Skype. Je parlais avec mes parents, et entre-temps, elle venait 10 minutes à l’ordinateur. C’est si beau d’avoir cela pour rester en contact malgré la distance ! Les voir et leur parler quasi de vive-voix. 20 ans plus tôt, on se serait échangé des cartes postales ou des lettres, beaucoup moins vivant et instantané. Ça a du beau notre époque malgré tout. Ça faisait aussi plaisir à ma mamy de pouvoir me parler chaque dimanche comme ça. Tout comme à moi. Elle me racontait un peu ses soucis, me demandait de mes nouvelles, comment ça se passait là-bas, si je mangeais bien, le temps qu’il faisait. Ce genre de discussions. Elle oubliait souvent le décalage horaire. Et puis, elle me faisait rire, avec ses mimiques, le fait qu’elle ne comprenne pas trop le fonctionnement de Skype, l’endroit où se trouve la webcam, où certaines fois elle s’avançait vers le bas de l’ordinateur et où je ne voyais plus que ses cheveux. De nombreuses fois, nous en sourions.

Lors de mon séjour à New-York, je lui ai acheté une petite statuette de la « Statue de la Liberté ». Plus tard, à Montréal, c’était une cloche avec une feuille d’érable. À chaque voyage que je faisais, je lui ramenais un petit quelque chose. Elle était contente de ces attentions et les mettait côte à côte dans son armoire. Certaines fois, elle les montrait à ses invités. Juste avant le décollage vers la Belgique, j’avais décidé de lui acheter un tout petit quelque chose en plus. Une peluche avec le mot « Canada » dessus. Juste une petite peluche pour lui apporter à l’hôpital. Car oui, quelques jours plus tôt, j’avais appris qu’elle y était entrée… une nouvelle fois. Comme ce fut le cas en décembre pour elle, et aussi pour mon autre grand-mère. Il se passe tant de choses en mon absence…

La veille, le 29 mars, j’apprenais que mon vol Londres-Bruxelles était annulé. Je devais prendre un bus pour rentrer en Belgique, et quitte à aller dans le centre-ville de Londres, je décidais d’y passer deux jours, puis d’aller faire la surprise à ma mamy à l’hôpital et lui offrir tous ces cadeaux.

22 heures à Montréal, je décollais. J’étais content de prendre un Boeing 777, l’avion que je rêvais de prendre en tant que voyageur. J’étais content durant tout le vol, tel un enfant. Certaines fois de petites choses bien futiles peuvent rendent heureux. Mais un bonheur doit-il forcément cacher un malheur en devenir ? Une question que je me pose.

5h30 plus tard, j’atterrissais à Londres. Je désactivais alors le mode-avion et c’est là que j’ai vu ce message qui restera à jamais gravé. Le genre de messages qui n’annonce rien de bon, qui est effrayant. Un message de ma maman disant « Jérôme, quand tu sais, téléphone-moi ». J’appréhendais l’appel. J’attendais de sortir du bus qui me conduisait de l’avion au terminal. J’appelais ensuite rapidement à la sortie mais ça sonnait occupé. Ça m’énervait, ça m’inquiétait. Je me suis trouvé un endroit, je regardais les gens passer, j’attendais l’appel. Le téléphone sonna. La voix de ma mère me faisait peur, car je savais qu’il s’était passé quelque chose. Elle me dit « Je te passe papa ». Ces simples mots m’ont fait comprendre ce qu’il s’était passé. Sa voix, son ton, tout était clair. Il me dit avec des instants de silence « J’ai quelque chose à te dire. Mamy n’est plus là. Elle est partie cette nuit, son cœur a lâché ». J’ai reçu un coup de massue. Les gens passaient et me regardaient interloqués. J’étais là, debout, regardant tout autour de moi, espérant que cela n’était qu’un putain de cauchemar. Je restais silencieux, je ne savais pas quoi dire. Le monde s’arrêtait pour moi. Je regardais tout autour de moi.

Rien qu’en écrivant ces lignes, des larmes glissent sur mes joues. Le souvenir de ce moment si terrible à mes yeux. J’étais très proche d’elle.

J’étais dans cet aéroport de Londres, complètement anéanti par cette annonce, les yeux embrumés d’une tristesse grandissante au fur et à mesure que je prenais conscience de la nouvelle. Un peu perdu sur quoi faire. Est-ce que je devais rentrer tout de suite ? Est-ce que je restais un peu sur Londres comme prévu ? J’avais déjà un bus pour le samedi matin me faisant arriver le samedi soir. Nous étions jeudi matin. Je pris deux bus pour arriver dans le centre-ville de Londres, je suis allé à mon auberge faire le check-in et déambuler dans la ville. Je voyais Big Ben, je voulais tellement la revoir, pourtant elle ne me rendait pas heureux. Quand j’avais 11 ans, c’était justement avec ma grand-mère que j’étais venu dans cette même ville. Juste une journée, elle m’accompagnait sur le voyage scolaire avec ma maman. Nous n’avions pas vu grand chose de la ville. Je me souviens avoir vu Big Ben depuis le car. J’espérais donc y revenir un jour pour mieux l’apprécier. C’est dans cette ville que j’ai voyagé avec, et c’est dans cette même ville que j’ai appris son décès. De la nuit, je n’ai pas dormi. 15 personnes dans un petit dortoir, des lits superposés avec 3 places par lit. Le silence était interrompu par des ronflements. Je parlais par Messenger avec ma sœur, qui elle non plus, à 400 km ne dormait pas. Oui je voulais rentrer. Je n’avais rien vu de Londres, hormis une version embuée par les larmes et les passants qui devaient se demander le pourquoi de mon état. Je ne pouvais pas rester plus longtemps, je ne voulais pas rester une journée de plus ici. Londres avait comme un goût nauséabond, un goût si amer. J’ai donc réservé un bus pour partir quelques heures plus tard. J’attendais encore quelques heures dans ce lit à me tourmenter, en frottant mes larmes. J’ai rapidement pris le petit-déj, je me forçais un peu et j’ai marché ensuite 35 minutes vers la gare des bus. Je perdais ma seconde nuit, ils ne voulaient pas me la rembourser mais je m’en fichais. Pareil pour le bus du lendemain. Ce ne sont que quelques euros. Rester ne m’aurait fait que me sentir encore plus mal dans cette solitude.

Je me disais que, le jour où je devrais apprendre cette nouvelle, je ne voulais pas être seul. Pourtant, c’est ce qui est arrivé… J’ai véritablement grandi avec, j’ai passé des jours et des jours durant mon enfance auprès d’elle.

Pendant plusieurs années, depuis le décès de mon grand-père, 11 ans plus tôt. Je m’occupais d’elle, de ses comptes, de l’emmener faire ses courses depuis que j’avais le permis de conduire. Elle habitait la maison à côté de mes parents, chaque matin, je passais du temps avec elle, et aussi à d’autres moments parfois dans la journée. Depuis mon départ, ma famille avait pris un peu la relève. Je devais partir et vivre cette aventure.

Face au décès de proches en voyage

 

Le retour

Premiers regards échangés avec mes parents alors que mon frère et ma soeur me déposaient, ils étaient venus me chercher à Lille où mon bus s’arrêtait. Mon père, puis ma mère, m’ont enlacé devant la porte d’entrée de la maison de ma grand-mère où elle reposait pour quelques jours. Les retrouvailles avec ma famille n’étaient pas simples mais à certains moments, on est bien mieux auprès de ses proches, même si la tristesse est grande.

La photo de couverture qui illustre cet article est une photo prise lors du vol Montréal-Londres. Ce dernier envol ensemble.

Quand on se trouve en plein vol, on est complètement déconnecté et injoignable. Il peut se passer tant de choses et tu l’ignores tout simplement.

Le dimanche précédant, ma mamy me disait « Oh je suis pressée de te voir, ça fait si longtemps ! Vivement jeudi ! ». Nous avions hâte tous les deux, tant hâte, mais la vie est cruelle parfois. Si cruelle…

Nous étions à quelques heures de nos retrouvailles, juste quelques heures pour se retrouver après 6 mois de voyage. La peluche que je lui avais achetée se trouve désormais auprès de son urne dans le columbarium. Une manière de pouvoir lui offrir malgré tout, même si je n’ai pas pu le faire réellement.

J’ai appris par la suite qu’elle avait quittée ce monde pile au moment où je décollais de Montréal. Nous nous envolions tous les deux en quelques sortes… mais pas pour la même destination.

Quand j’ai réservé mon vol début janvier pour le 31 mars, je n’imaginais bien-entendu pas une seconde que ce jour même serait celui de sa disparition. Pourquoi n’ai-je pas réservé juste quelques jours plus tôt… juste un jour ou deux pour pouvoir ne fus-ce que la revoir…

En 6 semaines, ce sont mes deux grands-mères qui s’en sont allées…

Je me demande si je suis condamné à être absent des derniers jours, semaines ou mois de la vie de membres de ma famille. Le voyage continue. Il continue mais avec une appréhension que cela arrive de nouveau un jour…

Avant de repartir pour Montréal, j’ai demandé à m’arrêter sur la tombe de ma grand-mère décédée en février. Une manière de pouvoir être un minimum présent auprès d’elle une dernière fois. Je m’en veux de ne pas l’avoir revue avant mon départ en octobre.

 

« Tu peux voyager, tu peux découvrir le monde, mais voyager, loin de son pays durant une longue période, c’est aussi être absent lors de moments importants, heureux ou malheureux. Au revoir mamy Nelly. Au revoir mamy Odette. »

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